Chair ou Esprit ?

février 11, 2013

Par David Brandt Berg

La controverse religieuse la plus vive que le monde ait connue est celle qui oppose depuis toujours les religions du type « c’est à toi-même de te sauver » à celles qui préconisent le « Dieu seul peut te sauver ». De tout temps, l’homme a essayé de se sauver lui-même, avec le moins d’aide possible de la part de Dieu. De cette manière, il n’avait pas besoin de remercier Dieu outre mesure et il pouvait s’attribuer la plus grande part du mérite, et n’en faire qu’à sa tête.

Le premier meurtre fut commis par un tenant de ce type de religion, Caïn, qui tua son frère Abel, un homme qui se confiait en Dieu. Ce meurtre marqua le début de la persécution de la véritable église par la fausse église. Caïn était religieux, et même très religieux. Il faisait de gros efforts pour gagner son salut à sa façon, en offrant à Dieu des sacrifices et en prétendant L’adorer. Il faisait de son mieux pour demander à Dieu de l’aider à mériter son propre salut. Il faisait peut-être de son mieux, mais ce n’était pas suffisant!

Car sa méthode n’était pas celle de Dieu. C’était celle de toutes les fausses religions. Elles dépendent toutes de leur propre rectitude morale et de leurs efforts personnels. La plupart, prétendant adorer Dieu, recherchent auprès de Lui le petit coup de pouce dont ils ont besoin. Malheureusement, du fait même qu’ils travaillent si dur à obtenir leur salut, ils s’imaginent le mériter — avec ou sans l’aide de Dieu — et sont profondément offensés si Celui-ci n’a pas l’air d’apprécier leur mérite. Ils protestent: « Regarde tout ce que j’ai fait pour Toi, Dieu! Tu devrais me décerner une médaille! Je mérite d’être sauvé! Si quelqu’un mérite d’être sauvé, c’est bien moi! Si quelqu’un peut prétendre au Ciel, c’est bien moi! »

À l’opposé, Abel se contenta de faire ce que Dieu Lui demandait, et « par la foi, il a offert à Dieu un sacrifice meilleur que celui de Caïn »[1], le sacrifice d’une foi pure dans la Parole de Dieu – le sacrifice du sang d’un agneau symbolisant le salut grâce au sang versé par le Christ. Ce faisant, Abel montrait que c’était à Dieu seul qu’il s’en remettait pour son salut. Il savait qu’il ne pouvait compter que sur la justice de Dieu, il ne pouvait se targuer d’être juste et ne devait son salut qu’à Dieu.

Cela démasquait Caïn, le travailleur acharné, le self-made-man, si pieux, si zélé dans sa façon d’adorer. Ses efforts futiles et son hypocrisie contrastait tellement avec l’humble sacrifice d’Abel, qu’il entra dans une rage folle. En dépit de tous ses efforts, de sa façon de raisonner purement formaliste, en dépit de ses protestations que tout son travail lui valait le salut, Caïn subit une telle humiliation qu’il tenta d’étouffer l’épouvantable vérité — à savoir l’incapacité de sa religion à le sauver – et qu’il tua l’homme dont la simple foi en la grâce de Dieu l’avait confondu.[2]

C’est ainsi qu’a commencé la lutte sans merci entre l’orgueil et l’humilité, entre les bigots attachés à la loi et les pécheurs sauvés par la grâce ; cette guerre qui fait rage depuis l’aube des temps entre la Babylone charnelle et la Jérusalem spirituelle, entre la chair et l’Esprit, entre les œuvres et la foi, entre la loi et la grâce, entre l’égo des hommes et Dieu.

Cet antagonisme a donné lieu à de graves malentendus, et à quelques-unes des pires interprétations de la Bible. Depuis tout ce temps, les hommes ont essayé de se sauver tout seuls, autant que possible sans Dieu, et sont allés jusqu’à pervertir le sens des Écritures pour faire croire que c’était possible!

Mais comme on ne peut pas se sauver tout seul, même si on supplie Die de nous donner un coup de main, et comme on ne peut pas servir à la fois Dieu et Mammon (l’argent)[3], les faux dévots décidèrent de servir Mammon plutôt que Dieu, et ils furent anéantis dans le raz-de-marée de Ses jugements. Seuls Noé et sa famille furent sauvés par la grâce de Dieu en entrant dans l’Arche, un symbole du Christ, et le même déluge qui engloutit le monde des incrédules sauva les croyants par la foi.

Mais croyez-vous que l’humanité en tira la leçon pour autant ? Comme le dit l’adage: « la seule chose que l’on retient de l’histoire c’est qu’on ne tire jamais les leçons de l’histoire. »[4] Bientôt, les hommes ont refait les mêmes erreurs, cette fois-ci en essayant d’élever une tour qui attendrait le ciel et qui serait un témoignage de leur génie et de leur grandeur. Mais ça non plus, ça n’a pas marché. Le résultat fut la confusion totale de Babel, et nous subissons aujourd’hui encore cette incroyable cacophonie de langues.[5]

Même quelqu’un comme Abraham eut recours à la ruse pour essayer de se sauver et de sauver sa postérité, jusqu’à ce que Dieu lui montre que le salut était entièrement par la foi, un miracle la puissance de Dieu, et que cela ne pourrait jamais être le fruit de ses efforts.[6]

Moïse essaya, lui aussi, pour finalement se retrouver face contre terre, devant Dieu, dans le désert, après s’être rendu compte qu’il n’y arriverait pas tout seul. Les Israélites essayèrent eux aussi de se passer de Dieu, et ils subirent défaite après défaite chaque fois qu’ils croyaient pouvoir se sauver eux-mêmes.

Et n’oublions pas Samson, qui découvrit à ses dépens à quel point il était vulnérable sans la puissance de Dieu. Saul et David aussi, se couvrirent de ridicule lorsqu’ils essayèrent de se débrouiller tout seuls ; ils avaient oublié que Dieu seul pouvait les sauver, et qu’en dehors de Dieu, il n’y avait point de salut.[7]

La plus grande dispute qui a divisé les premiers chrétiens était de savoir s’il suffisait de croire pour être sauvé ou s’il fallait en plus observer la loi mosaïque. Les chrétiens juifs ne pouvaient s’empêcher de penser que les juifs avaient une longueur d’avance sur les chrétiens les non-juifs. « Nous croyons que Jésus est le Messie, bien sûr », disaient-ils, « mais nous devons quand même L’aider à nous sauver en obéissant à l’ancienne loi. »  Ce mélange exécrable d’œuvres et de grâce écœurait tellement Paul qu’il engueula publiquement Pierre à ce sujet[8] et qu’il s’employa à combattre cette fausse doctrine pendant des années, dans une épître après l’autre.

Lorsque j’étais encore un jeune chrétien, je fus, moi aussi, trompé, et après des années d’incertitude, d’accablement et de découragement, je découvris qu’il me suffisait de croire, et rien de plus. « Qui place sa confiance dans le Fils possède la vie éternelle »[9] — dès maintenant! Pas de « à condition que…» ni de « mais…». Pas de « à condition que tu sois gentil et que tu ailles à l’église tous les dimanches », ni toute cette soi-disant perfection et toutes ces histoires de petits saints purs et sans péché qu’on nous présente comme des parangons de vertu.

J’avais été incapable de me sauver tout seul, et je le savais bien. On aurait dit que plus je m’efforçais d’être bon, plus je m’enfonçais ! « Malheureux que je suis! Qui me délivrera de cette mort qu’est ma vie? Dieu soit loué: c’est par Jésus-Christ notre Seigneur ! » [10] Voilà, un point c’est tout ! Il n’y a rien à ajouter : pas de perfection ni de bonnes œuvres qui tiennent. Rien de tout cela ne nous aidera à conserver notre salut, pas plus que cela ne peut nous sauver! Jésus seul peut nous sauver! Non seulement Il nous sauve, mais en plus c’est Lui qui agit à travers nous. Tout vient de Jésus, nous n’y sommes absolument pour rien. Ce n’est pas une affaire de vertu ou de sainteté. Non, c’est seulement Jésus. Quel soulagement ce fut pour moi ! Parce que je savais bien je n’y serais jamais arrivé. Il fallait que Dieu intervienne. Pour moi, c’était impossible.

C’est bien là le problème de nombreux chrétiens aujourd’hui: ils vivent toujours dans l’Ancien Testament, et ils pratiquent une religion d’œuvres. Lorsque nos premiers missionnaires arrivèrent au Japon, les Japonais leur demandèrent : « Êtes-vous des chrétiens de l’Ancien ou du Nouveau Testament? » Sur le coup, nos missionnaires ne comprirent pas ce qu’ils voulaient dire, mais ils ne tardèrent pas à découvrir que les « chrétiens de l’Ancien Testament » étaient ceux qui attribuaient une grande importance aux temples, aux cathédrales, aux cérémonies, aux rituels et aux traditions — et surtout, qui prônaient une religion d’œuvres. Par contre, les « chrétiens du Nouveau Testament » étaient ceux qui attachaient peu d’importance aux choses visibles, aux édifices, au décorum, mais qui mettaient l’accent sur la simplicité de la vie chrétienne au quotidien et les réalités invisibles de l’esprit, comme le faisaient Jésus et Ses apôtres. Beaucoup de vrai dans cette comparaison!

Trop de religions et de leurs adeptes vivent encore dans le passé, et même dans un passé païen, dont ils ont hérité une pléthore de traditions venues du paganisme idolâtre et de son goût malsain pour les édifices, le culte des temples, la prêtrise arrogante, le décorum, les cérémonies compliquées, les superstitions, et une emprise dictatoriale sur les âmes humaines qu’ils réduisent en esclavage par leur insistance sur le salut par les œuvres – leurs œuvres à eux, s’entend — leur religion particulière, la petite parcelle de Dieu qu’ils prétendent détenir.

Dieu Lui-même a eu toutes les peines du monde à détourner les enfants d’Israël de l’idolâtrie de l’Égypte. Il a dû les guider par l’intermédiaire de Moïse, en se servant de la loi mosaïque comme d’un maître pour les guider au moyen de petites illustrations, de rituels, et de petites leçons de choses, comme le Tabernacle, l’Arche, les sacrifices d’animaux, et le sang de bêtes.—Il s’agissait de symboles, d’images, de simples représentations des réalités et des vérités spirituelles qu’Il voulait leur enseigner, des petites analogies ridicules, comme des petits sketchs ou des comptines destinées à enseigner des vérités spirituelles à des petits enfants. Il a dû s’appuyer sur ce qu’ils comprenaient, les symboles familiers de la religion des Égyptiens et des autres nations païennes de la région, pour essayer, en bon Père qu’Il est, de leur présenter les vérités spirituelles de l’authentique adoration de Dieu sous une forme audio-visuelle. Comme le disait l’apôtre, tout cela n’était qu’une « simple image du véritable »[11], une pâle imitation, ou une illustration visuelle, des réalités invisibles de l’Esprit.

Les archétypes et les illustrations de l’Ancien Testament mériteraient qu’on leur consacre une étude particulière. Comme le disait l’apôtre Paul : « Aujourd’hui, certes, nous ne voyons que d’une manière indirecte, comme dans un miroir … mais alors je connaîtrai comme Dieu me connaît. »[12] « Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais et je raisonnais en enfant. Une fois que je suis devenu homme, je me suis défait de ce qui est propre à l’enfant. »[13] « Mais le jour où la perfection apparaîtra, ce qui est partiel cessera. »[14]

Paul disait par là que même les dons de l’Esprit, en cette ère éclairée du Nouveau Testament, sont un peu comme des jouets d’enfants qu’un Père aimant aurait offert à Ses petits enfants un peu simples d’esprit, pour les aider à mieux Le comprendre et à connaître Sa volonté. À combien plus forte raison devrait-on considérer les illustrations physiques propres au culte du temple de l’Ancien Testament, comme des jouets encore plus enfantins destinés à des enfants encore plus immatures spirituellement, pour les aider à comprendre l’amour de leur Père céleste!

Or « à bien des reprises et de bien des manières, Dieu a parlé autrefois à nos ancêtres par les prophètes. Et maintenant, dans ces jours qui sont les derniers, c’est par Son Fils qu’Il nous a parlé. »[15] Quand Jésus est apparu, Il a dit à la Samaritaine qui était près du puits: « Mais l’heure vient, et elle est déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père par l’Esprit et en vérité; car le Père recherche des hommes qui L’adorent ainsi. Dieu est Esprit et il faut que ceux qui L’adorent L’adorent par l’Esprit et en vérité. »[16] Et c’est l’ère spirituelle dans laquelle nous vivons actuellement.

Mais Paul va plus loin encore lorsqu’il annonce dans sa prédiction aux Corinthiens que le temps vient où nous verrons Jésus face à face et où nous mettrons de côté ces dons enfantins de communication dans l’Esprit. « En effet, dit-il, les messages inspirés cesseront, le don des langues prendra fin, et celui de la connaissance cessera. Notre connaissance est partielle, et partielles sont les révélations de nos messages inspirés. Mais le jour où la perfection apparaîtra, ce qui est partiel cessera. »[17] Même ce que nous connaissons maintenant n’est qu’un échantillon des glorieuses réalités à venir!

L’Ancien Testament était l’ère des illustrations, et l’ère actuelle, du Nouveau Testament, est celle des vérités spirituelles qu’on ne peut saisir que par la foi.[18] Mais une fois que Jésus sera revenu, nous Le verrons tel qu’Il est, nous serons semblables à Lui et nous connaîtrons la plénitude des réalités de Dieu et du monde à venir![19] Alléluia! Pour l’instant, vous avez votre salut uniquement par la foi et dans l’esprit. Mais à ce moment-là, il deviendra bien réel : votre salut sera tangible et visible ; vous aurez même un nouveau corps et vous vivrez dans un nouveau monde—votre salut sera complet.

Première publication février 1971. Mise à jour et réédition, in Anchor, le 16 janvier2013. Traduit de l’original anglais « Flesh or Spirit ?» par Bruno et Françoise Corticelli, et Bernard de Bézenac.

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[1] Hébreux 11:4

[2] Genèse 4:1–8.

[3] Matthieu 6:24.

[4] Friedrich Hegel, philosophe Allemand (1770–1831).

[5] Genèse 11:1–9.

[6] Genèse 12:10–20, 20:1–18.

[7] Cf. Exode, 1 Samuel, 2 Samuel, et Juges.

[8] Galates 2:11–21.

[9] Jean 3:36.

[10] Romains 7:24–25.

[11] Hébreux 9:24.

[12] 1 Corinthiens 13:12

[13] 1 Corinthiens 13:11

[14] 1 Corinthiens 13:10.

[15] Hébreux 1:1–2.

[16] Jean 4:21–24.

[17] 1 Corinthiens 13:8–10.

[18] Jean 1:17.

[19] 1 Jean 3:2; Philippiens 3:21.

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